Pour sa dernière année à Saint-Nolff (chose qui a été annoncée le dimanche par Yann Le Baraillec lors de sa conférence de presse de fin de festival), le Motocultor a fait les choses en grand ! Le festival qui avait débuté comme un petit festival local plus de 10 ans plus tôt est aujourd’hui devenu grand, et propose maintenant pas moins de 4 scènes pour satisfaire les milliers de métalleux présents chaque année, sur 4 jours. Cette année, le jeudi est consacré au rock, commençons dont par cette journée !
JEUDI
Après avoir fêté comme il se doit le retour sur Saint-Nolff sous le chapiteau, désormais officiel, du Macumba, il est temps de commencer les choses sérieuses avec une première journée de festival, placée sous le signe du rock ! Après être allé me promener un peu sur le site, notamment sur le metal market toujours plus qualitatif, et autour des food trucks, je me dirige vers la Suppositor Stage (ma préférée des 4 scènes du festival) pour voir Sang Froid. Véritable coup de cœur lorsque je les avais découverts en première partie de Sylvaine à Paris, j’était directement dans le bain pour apprécier le rock gothique de Sang Froid, toujours aussi efficaces sur scène en cet après-midi ensoleillé. Les curieux semblent sous le charme du groupe français et tant mieux ! Sang Froid ont prouvé qu’ils sont une valeur sûre, et on leur souhaite de continuer avec ce projet, car on manque de groupes comme ça en France !
Un petit arrêt au camping pour prendre une douche (d’ailleurs, celles-ci sont mieux agencées qu’auparavant et plus facilement accessibles), et il est déjà l’heure de repartir sur le site du festival pour voir la fin de Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs, qui remuent le public de leur stoner teinté de post punk, en prévision du gros morceau stoner de cette soirée : les américains de Clutch ! Très en forme, la bande de Neil Fallon nous frappe avec pas moins de 19 morceaux de leur stoner rock puissant et dansant, passant de X-Ray Vision à Willie Nelson, et finissant par The Face ! Clutch nous sa proposé là un show explosif qui aura convaincu tout le monde et mis tout le public dans le bain, et ça tombe bien car je me suis mis au premier rang pour voir The Libertines ! Le groupe anglais mené par Peter Doherty et Carl Barat semble être l’OVNI de la programmation, mais bien qu’ils aient vieilli, les « Libs » montrent qu’ils ont toujours leur mojo et nous offrent un set qui rendra tous les fans de rock indé nostalgiques. En effet, le groupe met en avant une majorité de titres de ses deux premiers albums cultes, Up The Bracket et The Libertines, qui convaincront tous les fans présents, mais assez peu les métalleux. Dommage, car c’était un très bon set !
Je vais manger un ramen, et voilà déjà la tête d’affiche de cette journée rock ! Les punk nordiques de The Hives prennent le contrôle de la scène et ne laissent pas un instant de répit au public breton, assénant son désormais classique Come On !, extrait du dernier album du groupe (qui, mine de rien, date de 2012), suivi du classique absolu Main Offender et de Go Right Ahead. The Hives sont en forme, et le public n’attendait que ça pour lancer un des plus gros pogos du festival, avec comme point d’orgue un wall of death d’anthologie sur « Tick Tick Boom » ! Pelle Almqvist et sa bande ont prouvé une fois encore la supériorité de The Hives en termes de jeu de scène ! Et c’est avec le sourire jusqu’aux oreilles que je vais finir le concert assis à côté de la Massey Ferguscène pour écouter Ko Ko Mo jouer une bonne partie de son nouvel album, Need Some Mo, avec une reprise anthologique de « Last Night The DJ Saved My Life ».
Essai réussi, donc, pour cette première journée placée sous le signe du rock pur et dur ! J’avais très hâte de voir la suite du programme, pour entamer les choses sérieuses.
VENDREDI
Aujourd’hui, pas de répit ! J’y vais dès l’ouverture pour voir l’excellent set d’Aephanemer, qui par leur death mélodique vont réveiller tous les festivaliers présents avec fracas ! Le groupe, très énergique sur la Dave Mustage malgré l’heure très « matinale » (il était 13h, mais en festival ça compte comme le matin, on va dire), m’aura mis dans un très bon mood pour cette journée qui envoie franchement du bois ! Le temps de prendre un repas à l’espace presse, et il est déjà temps de repartir pour voir le set de Klone sur la Massey Ferguscène. Forts de leur album Le Grand Voyage, et peu avant la sortie de Meanwhile, Klone nous jouera un set ultra propre comme à son habitude, de Yonder à Immersion en passant par la reprise d’Army Of Me de Björk, Klone fournissent encore une fois un set parfait pour ses fans, qui seront à n’en pas douter plus nombreux à l’issue de ce concert. Pogo Car Crash Control prendront ensuite le contrôle de la même scène pour un set punk puissant, regroupant la plupart des festivaliers du Motocultor au même endroit. Les pogos et les slams s’enchaînent tandis que le groupe prouve une nouvelle fois avec les chansons de Fréquence Violence qu’ils sont imparables sur scène ! Un petit tour devant les ritournelles folk de Naheulband, qui me rappelleront des souvenirs sans me transcender plus que ça, et direction ensuite la Suppositor Stage pour voir les frères brésiliens de Krisiun, réguliers du festival (c’est leur 4ème passage), qui s’apprêtent à représenter leur nouvel opus, l’excellent Mortem Solis. Un set puissant et sans concession sous le soleil vannetais me donnera franchement la banane, devant un groupe de death metal culte et toujours aussi efficace après plus de 30 ans de carrière !
Le temps de manger et il est déjà l’heure d’assister au set de Kreator ! Le temps passe décidément vite à Saint Nolff ! Le groupe allemand rejoint en 2019 par Fred Leclercq de Dragonforce se prépare à déchaîner Hate Uber Alles sur la Bretagne, et le fait avec une mise en scène de toute beauté ! Entre le magnifique backdrop aux couleurs de l’album, les mannequins pendus en fond de scène et la lumière rouge enveloppant les lieux, le thrash de Kreator emporte tout et tout le monde sur son passage. Mention spéciale à Satan Is Real, toujours aussi efficace, et au classique Pleasure To Kill qui achèvera tous les survivants du set massacrant ! Après ça, quoi de mieux que de changer totalement d’ambiance avec les Norvégiens de Leprous ? Majoritairement composé de morceaux récents (les plus anciens remontant à The Congregation, leur album de 2014), le set de prog doux est nuancé de morceaux plus puissants comme The Sky Is Red ou Nighttime Disguise, deux morceaux qui révèlent toute la complexité du groupe, qui va bien plus loin que la voix du virtuose Einar Solberg. Le public semble surpris, mais plutôt réceptif à la musique de Leprous, qui après avoir joué au Hellfest en juin ont conquis une fois de plus encore plus de fans de leur prog rock virtuose ! Et en parlant de virtuosité, j’ai fait le choix de me démonter la nuque sur le concert de Suffocation, au premier rang duquel je me suis immédiatement rendu. Les américains nous servent les mandales bien fraiches, avec des changement de rythme toujours bien sentis, et nous étonnent toujours plus par leur maîtrise du rythme justement, qui est tellement complexe que même les headbangers s’y perdent ! Le public de la Suppositor Stage est carrément conquis, moi aussi, et je décide donc de partir sur cette magnifique note et de rentrer à la tente me reposer un peu pour le lendemain.
SAMEDI
Plus fatigué que la veille, c’est vers 13h que je me mets en route vers les scènes, avec comme premier concert les français de Ten56. Le groupe, distillant un mélange puissant de metalcore, de metal industriel et de plein d’autre choses (le trap metal entre autres) nous sort une mandale dès le début d’après-midi, avec une présence scénique déjà impressionnante. N’ayant sorti qu’un EP au moment de ce concert, c’est un set qui semblera très court qu’ils auront donné sur la Suppositor Stage, mais ils ont convaincu tout un public (qu’on retrouvera d’ailleurs en grande partie quelques mois plus tard à Lorient). Après avoir ensuite assisté au concert ultra fun des Princesses Leya, orné du « tue tes parents » de Dedo et du « Je Vous Emmerde et Je Rentre A Ma Maison » extrait de leur album (très drôle d’ailleurs) L’Histoire Sans Fond, qui aura fait plaisir au public traditionnel du Motocultor, habitué aux concerts fun (on se souvient de l’accueil d’Henri Dès et de Giedré il y a quelques années), je me dirige vers le market pour faire le tour des festivaliers, qui semblent globalement très satisfaits de cette nouvelle mouture du festival, mais qui reprochent cependant les prix plutôt élevés de la nourriture et l’omniprésence de la brasserie 86 sur le site. Par contre, niveau concerts, les gens semblent ravis ! C’est d’ailleurs le cas devant Benighted, qui livrent en cette fin d’après-midi un set d’anthologie, enflammant carrément le public breton avec une énergie sans pareil. La bande de Julien Truchan, le sourire jusqu’aux oreilles, a livré certainement un des plus beaux concerts de cette édition !
Après une pause à nouveau, je me pose devant les anglais de Tesseract sur la Dave Mustage, qui joueront un concert carré comme à leur habitude, mais plus heavy que leurs collègues de Leprous la veille, ce qui ravira les fans de djent présents en nombre sous le chapiteau. Vient ensuite le tour de Vader et de God Is An Astronaut de défendre leurs nouveaux albums respectifs. Ne sachant pas que choisir entre les deux, je décide de prendre un peu de chaque, observant le death metal de Vader du fond de la plaine avant d’aller fermer les yeux devant God Is An Astronaut. Les deux sets sont carrés, on voit que les deux formations ont de la bouteille, mais j’ai légèrement préféré God Is An Astronaut, qui lancent les concerts post metal de la soirée. Vient ensuite le moment de manger une pomme de terre de Mémé Patate (l’un des food trucks du festival) devant les Wampas, qui sont en grande forme aujourd’hui ! En terrain conquis, la bande de Didier Wampas écumera tous les classiques de Lalalla à Manu Chao sans oublier Rimini, et le public chantera en cœur tout le long devant la Bruce Dickinscène, nouveauté de cette année d’ailleurs. Je passe vite fait au camping ranger le merch acheté et voilà déjà l’heure de voir Batushka (le vrai) lancer une véritable transe collective devant la Suppositor Stage. Le public, très silencieux (à part 2 ou 3 gueulards entre les morceaux) n’en est pas moins 100% réceptifs, et l’ambiance très spéciale s’empare de moi, complètement fasciné par ce qui se passe devant mes yeux. Les membres sont en costume, masqués, et jouent leur black metal teinté de chants grégoriens devant 2 icônes des couvertures d’album du groupe, entourés de bougies. Une fois le concert terminé, le guitariste (Krzysztof Drabikowski) les distribuera d’ailleurs aux fidèles des premiers rangs, complètement conquis. Après tout ça, on terminera au camping autour d’une bière à écouter la fin du set des Ramoneurs de Menhirs, qu’on a vu et revus, mais qui sont toujours un plaisir à entendre !
DIMANCHE
Dernière journée de festival et la plus chargée pour moi au niveau du running order ! En effet, étant très fan de thrash metal old school et de metalcore, le programme de la journée est tout trouvé ! Et ça commence par Vended, le nouveau groupe de néo metal américain formé autour de Griffin Taylor et Simon Crahan, fils respectifs de Corey Taylor et Shaun Crahan de Slipknot. Leur néo très inspiré de celui de leurs pères est puissant et efficace avec un jeu de scène énergique qui entraîne le public plutôt matinal du festival, mais souffre un peu de la comparaison facile avec Slipknot (ce qui n’est pas arrangé avec la tenue de scène du bassiste Jeremiah Pugh, masqué et imitant clairement les membres de Slipknot). On verra au Hellfest comment ils ont évolué en un an ! Avec l’annulation de 1914 (pour une très bonne raison), je regarderai du côté du chapiteau le set très efficace de Rivers Of Nihil avant de me diriger vers les stands de merch (j’ai vraiment fait mes courses ce jour-là, les prix du merch artistes étant bien plus abordables que les autres jours). Vient ensuite un moment que j’attendais depuis le début du festival : le concert de Bloodywood ! Le groupe de metalcore indien arrive devant un public de curieux, et le bouche à oreille ayant été particulièrement efficace dans le camping, le set s’enflamme dès le début de Gaddar, morceau le plus violent du groupe. Mélangeant instruments traditionnels, rap, scream et breakdowns extrêmement puissants, Bloodywood convainquent très vite le public du Motocultor, qui en redemande au point que le groupe reviendra jouer Gaddar en rappel, et viendra rencontrer le public peu après le concert.
Après une conférence de presse sur l’avenir du festival avec Yann Le Baraillec en loges, il est temps de reprendre les concerts avec un enchaînement monstrueux ! Bury Tomorrow prennent le contrôle total de la Dave Mustage pour présenter un concert de metalcore brutal et mélodique à la fois, qui séduit encore une fois un public qui le leur fera savoir par des moshs et des slams incessants ! Les anglais retournent le public breton comme une crêpe (vous l’attendiez pas celui-là, hein) avant une soirée qui s’avèrera encore plus puissante. Un petit repas rapide au food truck de la zone presse et on enchaîne sur Exodus, accompagnés cette fois de Gary Holt à la guitare (il était absent pendant plusieurs années, faisant partie de Slayer également). Forts d’un nouvel album exceptionnel (Persona Non Grata) la bande de San Francisco fait trembler le sol par des riffs et des solos de haute voltige, carrément à la hauteur de la réputation du groupe, en véritables légendes du thrash qu’ils sont. Le public, conquis, se dirigera ensuite en masse vers la Massey Ferguscène et la Suppositor Stage pour assister aux concerts d’Electric Callboy et de Dark Funeral. Deux salles deux ambiances, mais j’ai fait le choix d’aller voir les allemands d’Electric Callboy. Quelques semaines avant la sortie de leur album triomphal, Tekkno, ils nous proposeront un show composé à 100% de hits, et proposeront même en avant-première Hurrikan, pour sa première représentation en live ! A grand renforts de stroboscopes et de confettis, l’ambiance et la chaleur montent sans s’arrêter jusqu’à l’apothéose We Got The Moves, qui aura ravi tous les fans de metalcore, moi compris, dans l’assistance. Magistral !
Pour entamer le sprint final, Testament prendra le contrôle de la Dave Mustage avec un décor à l’image de l’excellent Titans Of Creation, devant lequel le géant Chuck Billy distillera son thrash metal à l’ancienne, avec une voix puissante comme jamais. Je ne boude pas mon plaisir devant un spectacle aussi puissant, mais je décide sur un coup de tête que ça fait un moment (depuis le Motocultor 2015 pour être exact) que je n’ai pas vu Orange Goblin. Je me dirige donc une dernière fois vers la Bruce Dickinscène afin de voir un show rock n’roll à souhait, juste à temps pour entendre le génial Made Of Rats, un de mes morceaux préférés des anglais. Là encore, deux salles deux ambiances, mais deux shows de qualité franchement égale entre Testament et Orange Goblin, qui ravissent tous les deux le public ! Igorrr enchaîneront avec un show visuel impressionnant que j’avais déjà vu au Trianon à Paris, mais l’absence remarquée d’Aphrodite Patoulidou mettra une ombre au tableau, irréprochable par ailleurs, peint par les français. Nul doute que Marthe Alexandre, ayant rejoint le groupe récemment, saura combler le vide constaté sur le Motocultor et rendre le set encore plus beau, alors-même qu’il est déjà magnifique ! On finira sur une nouvelle représentation de Behemoth, groupe habitué du festival, qui vient défendre Opvs Contra Natvram, leur dernier opus. Nergal est plus en voix que jamais mais on sent la fatigue des festivaliers s’intensifier après 4 jours de festival intense, et celui-ci semble se réduire régulièrement. Behemoth font cependant le show malgré l’absence de lance-flammes (la préfecture en ayant interdit l’usage à cause de la sècheresse, ce qui a mené à de nombreuses rumeurs quant à l’annulation du concert d’ailleurs). Le public chante en cœur sur Bartzabel, lève ses cornes au ciel sur Ora Pro Nobis Lucifer, et c’est sur une magnifique apothéose que Behemoth clot le festival sur O Father O Satan O Sun, mon morceau préféré du groupe. Et il est déjà l’heure de rentrer pour moi !
Le Motocultor 2022 présente à n’en point douter une belle édition du festival, avec de nombreux progrès, sur la restauration et sur la programmation plus pointue que jamais par exemple, avec une belle première journée rock, et un camping grandement amélioré, et même si certains points d’amélioration subsistent (les prix de la nourriture et le manque de choix de boissons notamment), le festival progresse et reste très, très, très appréciable !