MACHINE GUN KELLY – mainstream sellout

UN ARTISTE QUI OSE

« I heard the feedback, I’m a poser » – mainstream sellout

Le ton est donné et Machine Gun Kelly sait parfaitement ce qui marche, ce qui se « vend » et comment faire parler de lui. Conscient de l’impact voire de la jalousie et de la haine suscitée par sa carrière, l’artiste joue des codes et réussit un véritable tour de force en utilisant avec humour, auto-dérision et ironie, tout ce qui se raconte à son propos. MGK l’a bien compris et le tourne alors à son avantage et à sa faveur.

Leave the scene you’re ruining it
You sold out and it makes me sick

Quitte la scène [emo/pop punk ndlr] tu la gâches
Tu t’es vendu et ça me rend malade
– mainstream sellout

LA PROGRESSION VERS L’EMO POP-PUNK ROCK

Des covers d’hymnes emo pop-punk (Misery Business de Paramore) ainsi que des collaborations avec les acteurs actuels et majeurs du genre (Yungblud, Travis Barker) et 2 ans après le succès tonitruant de Tickets To My Downfall, Machine Gun Kelly reprend du service avec mainstream sellout. Originalement baptisé «born with horns » (tatouage en commun avec Travis Barker qui ouvre l’opus), c’est finalement la track #6 de l’album qui donnera le nom au nouveau projet de MGK. L’oeuvre est une nouvelle fois produit par le batteur de blink-182.

DE RAPPEUR A ROCKEUR

Colson Baker n’a que 31 ans et a déjà plusieurs vies et plusieurs carrières. Bien qu’il demeure plus que populaire et plus que jamais un sujet « trendy », MGK n’en n’est pas à ses débuts et justifie d’une solide discographie avec pour fondations : le rap. Au-delà des tabloids, sa grande gueule, les  « feuds » avec Eminem, clashs et autres « hot topics », l’artiste originaire de Cleveland a pour premier amour le rap. C’est grâce à sa persévérance et ses multiples mixtapes, opus (Black Flags, Bloom et le remarquable « Hotel Diablo ») et prestigieuses collaborations avec des grands noms du RAP US qu’il parvient à se faire une place et à dépeindre son quotidien avec justesse. 

Perfomance au Late Late Show with James Corden

L’interprète de  I’m Think I’m Okay  ne s’est donc pas contenté de s’en tenir à son style de prédilection et s’oriente, contre toute attente, vers le pop punk, épaulé par Travis Barker, que l’on ne présente plus. Les « Lockdown Sessions » ont amorcé la transition vers ce genre, en principe à l’opposé du sien pour révéler le cinquième effort studio du « Bad Boy » (référence à son label, « Bad Boy Records »). Après l’invitation pour assister à sa chute (Tickets To My Downfall), voici celle du jugement dernier ;  mainstream sellout  sous-entendu être un vendu/disponible/accessible/plaire au plus grand nombre quitte à perdre en authenticité. C’est ce dont l’artiste a été taxé par celles et ceux qui voyaient d’un mauvais oeil l’orientation du rappeur vers ce style. Comme si certains genres musicaux se devaient d’être élitistes, uniquement réservés à celles et ceux qui oeuvrent pour et qui ont toujours évolué dedans. N’est-ce pas là un antagonisme ? Un.e artiste ne doit-il pas être connu et reconnu pour son travail ? Mesure-t-on la qualité d’une oeuvre à sa notoriété, à sa grande accessibilité avant sa qualité ? Quoi qu’il en soit, MGK ose tout et se positionne là où on ne l’attend pas. 

N’en jugeant que par le style et l’allure de Machine Gun Kelly qui se prête d’avantage aux figures emo-punk, (il a joué Tommy Lee dans le biopic de Mötley Crüe, The Dirt) c’est avec une grande surprise que j’ai découvert un rappeur derrière cette figure très rock. Je me suis même demandé si il s’était déjà prêté à l’exercice du genre qu’il défend aujourd’hui.  

Machine Gun Kelly lors du défilé Dolce & Gabbana Ready to Wear Fall/Winter 2022-2023 dans le cadre de la Fashion Week Menswear de Milan, le 15 janvier 2022 à Milan, en Italie. (Photo par Victor VIRGILE/Gamma-Rapho via Getty Images)

Être précoce et empreint à ses démons en tant que rappeur, le changement musical pas si radical que ça semble avoir été bénéfique et libérateur pour MGK. Il est incontestable qu’il s’agit ici d’un album fait avec sincérité, don de soi et volonté de vouloir s’améliorer, de s’épanouir et tout simplement, s’éclater. Il est impressionnant de voir à quelle vitesse et aisance Colson Baker sait approprié les codes et l’univers du pop-punk.

Le pop-punk prend vie avec une toute autre ampleur et tournure en live, dans le pit, partagée en live. Cet album aspire à cette volonté de donner forme à une oeuvre qui se vit, qui se ressent, comme un exutoire, un échappatoire. La recette savamment concoctée par Travis Barker déjà présent sur Tickets To My Downfall  reste simple, efficace, concise et n’hésite pas à faire appel à ses poulains et protégés pour agrémenter mainstream sellout  :

DES COLLABORATIONS ET FEATURINGS D’ARTISTES DE TOUS GENRE MUSICAUX

Willow Smith est présente sur emo girl, son album « Transparent soul » a été produit par Barker. On retrouve blackbear sur le titre make up sex déjà présent sur My Ex’s Best Friend. Pas de featuring avec Avril Lavigne bien que Machine Gun Kelly apparaît sur « bite me » et que le dernier album de la reine incontestée du pop punk  Love Sux  est produit par le batteur de blink-182 et signé sur le label de ce denier. Baker sait s’entourer et cela n’apporte que d’autant plus de poids à sa crédibilité, quoi que l’on dise.

En alliant ses talents avec Bring Me The Horizon sur le titre maybe, LE groupe d’emocore Anglais par excellence mené par Oli Sykes, Machine Gun Kelly s’assure alors une place de choix dans le paysage emocore et se garantit peut-être même un nouveau public. On appréciera l’attachement à ses racines avec toujours des featurings d’artistes rap tels que Lil Wayne  (drug dealer), Gunna ou encore Young Thug (die in California)

Toujours dans cette volonté de rester fidèle à l’univers visuel et sonore pop-punk, on notera une référence punk non négligeable dans « sid & nancy » Sid Vicious, bassiste des Sex Pistols et Nancy Spungen, sa manager et compagne.

UN UNIVERS VISUEL FORT & UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION PUISSANTE

Machine Gun Kelly a incontestablement l’art et la manière de vendre son projet et de susciter un intérêt certain pour le plus grand nombre, en bien ou en mal, curiosité mal placée ou réelle ferveur, on en parle. On notera également le génie marketing et le coup de communication ultra bien pensé et innovant et une scénographie artistique pour ses lives toujours impeccable et visuellement marquante.

On peut citer la manière dont le tracklisting de l’album a été révélé dans un club de Los Angeles : un look / tee-shirt pour chaque titre retiré une à une de la marque Dolce & Gabbana dont il est l’égérie.

Une pochette pour la version digitale et une autre pour la version physique. Les codes punk que ce soit en terme de couleur ‘blanc, rose, noir) ou de style (les docs, les chokers, les spike, la guitare) sont respectés et restent fidèles au genre défendu.

Pochette en version digitale

EN CONCLUSION

Plus « sombre » et plus centré sur l’instrument, mainstream sellout  est plus intéressant en terme de direction artistique et de production, on déplore le manque de titres qui sortent du lot et se démarquent. A l’image de Tickets To My Downfall l’ensemble reste relativement similaire mais avec une belle énergie et une production soignée. On ne s’ennuie pas et on prend plaisir à l’écouter, l’atout majeur résidant dans la force et la puissance que l’album a de nous dépeindre une époque et nous faire replonger dans les souvenirs, l’adolescence, l’époque de l’âge d’or de l’emocore et du pop-punk. Certes, MGK n’est pas par définition un artiste 100% rock ou punk et “n’invente” rien mais il en reste néanmoins un artiste qui ose, qui évolue, innove, prend des risques mais surtout, le fait avec plaisir tout en restant fidèle à lui-même. Je ne pense pas qu’il y ait eu une volonté intéressée et opportuniste de s’emparer de la scène emo punk et d’y voir un “bon filon”. N’en déplaise à ce qu’on dit de lui. mainstream sellout est un album intelligemment bien pensé, conçu et produit qui donne déjà l’envie d’entrevoir ce que Machine Gun Kelly réserve pour la suite !

Anyway, I hope the next song is a banger
Enjoy Machine Gun Kelly’s album

– Wall of Fame [interlude Pete Davidson, Casie Baker (fille de MGK), Machine Gun Kelly

PS : Machine Gun Kelly sera en concert exceptionnel au Zénith de Paris le 29 Septembre avec Iann Dior & 44Phantom en invités !

Lien billetterie

3/5

Coups de coeur : die in California, mainstream sellout, sid & nancy

mainstream sellout – Machine Gun Kelly (Interscope Polydor / Bad Boy Records

Disponible en écoute sur toutes les plateformes digitales et en physique (CD, vinyle en pré-commande sur Fnac.com)

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